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L’Elisir d’Amore de retour à la maison

Publié le 26.09.2022

En 2012, l’Opéra de Lausanne présentait la création de la mise en scène d’Adriano Sinivia de l’Elisir d’Amore, opéra emblématique de Donizetti. Depuis, cette production a connu le succès et a voyagé à Monte-Carlo, Tours, Pampelune ou encore Bordeaux plus récemment. Dix ans plus tard, elle est de retour à l’Opéra de Lausanne du 2 au 9 octobre 2022 avec une double distribution pleine de promesses. Rencontre avec la soprano franco-italienne Laurène Paternò, qui tient le rôle principal d’Adina dans la distribution «jeunes solistes».

C’est une prise de rôle pour Adina, mais ce n’est pas votre première à l’Opéra de Lausanne. Quel lien entretenez-vous avec l’institution?

Laurène Paternò: J’ai fait partie du chœur de l’Opéra de Lausanne quand j’étais toute jeune étudiante. Je suis entrée à la Haute École de Musique de Lausanne en 2014, puis dans le chœur de l’Opéra en 2015, tout s’est assez vite enchaîné. Pendant mes études, j’ai eu l’occasion de participer à plusieurs productions, puis Éric Vigié, le directeur de l’Opéra de Lausanne m’a proposé mes premiers engagements de soliste. On est partis au Bhoutan en 2018, pour donner l’opéra La Serva Padrona. C’était un projet hors normes dans lequel je tenais le rôle de soprano, Serpina. J’ai également participé à deux Routes Lyriques, des tournées organisées par l’Opéra de Lausanne un été sur deux, souvent destinées à de jeunes chanteurs en début de carrière qui ambitionnent une carrière de solistes.

Pour l’anecdote, en 2020, je figurais dans la distribution de cette production de l’Elisir d’Amore dans le rôle de Giannetta. Elle a été reportée pour cause de pandémie et quand la production a été reprogrammée, Éric Vigié m’a proposé d’auditionner pour le rôle d’Adina.



Ce n’est pas habituel d’avoir une distribution « jeunes solistes » dans une production. Quel en est l’objectif ?

Avoir des doubles distributions dans des maisons d’opéras comme Zurich ou Paris est une chose assez courante, mais à Lausanne, c’est très différent. L’objectif de cette configuration est de mettre en valeur et de donner la place à des chanteurs en début de carrière, les mettre sur une scène dans des rôles importants, dans une production majeure.

Le directeur de l’Opéra de Lausanne a un profond intérêt pour la relève. Il s’intéresse vraiment aux jeunes chanteurs; il essaie toujours de leur donner des opportunités, en témoignent les Routes Lyriques ou les distributions «jeunes solistes» en parallèle des distributions internationales.





Comment se passent les répétitions d’un opéra, du côté des chanteurs?

Les répétitions ont débuté le 5 septembre, nous avons presque un mois de répétitions avant le début des représentations. On commence toujours avec une répétition musicale, c’est-à-dire accompagnés d’un piano, avec le chef d’orchestre, assis sans mise en scène.

On enchaîne ensuite rapidement avec les répétitions scéniques, sur le plateau ou en salle de répétition, mais dans le décor. Il peut arriver que l'on travaille en salle de répétition – si le plateau est occupé par une autre production –, on se trouve dans les dimensions de la salle avec des éléments de décor, qui ne sont pas forcément les éléments définitifs du plateau, mais qui sont au même format et qui nous servent à nous repérer et à nous déplacer dans l’espace dans les mêmes conditions.

Autant de répétitions pour seulement deux représentations de la distribution "jeunes solistes", n’est-ce pas un peu frustrant

C’est vrai que l’on pourrait être un peu frustrés de préparer l’opéra pendant un mois et le présenter deux fois, mais on ne va pas se plaindre, parce qu’on a de la chance. Ce n’est pas tous les jours qu’un directeur d’opéra a autant à cœur de donner la place à des jeunes chanteurs. On aura certainement l’occasion de rechanter ces rôles par la suite.





Quels sont les défis que représentent votre personnage?

Pour la partie théâtrale, j’éprouve beaucoup de plaisir à interpréter ce personnage en lui-même, car elle est vraiment captivante. Je pense qu’en réalité, Adina est un peu amoureuse de Nemorino depuis le début, mais elle n’a pas trop envie de s’arrêter à ce «détail». Il est clair qu’elle a envie de le voir à ses pieds, elle le dit littéralement. De ce côté-là, sa personnalité n’est pas des plus sympathiques, elle est un peu cruelle, mais au fond, elle est attachée à lui. Elle se révèle à la toute fin quand elle voit qu’il se désintéresse d’elle. Dans cette mise en scène, on imagine qu’ils se connaissent depuis toujours, donc ils ont une sorte de complicité très intéressante pour le parcours du personnage.

Adina est très drôle à jouer, vive et espiègle, avec un peu de bienveillance. Du point de vue vocal, c’est un gros rôle. Adina a deux airs dans l’opéra, puis des duos, trios, quatuors… Mais les ensembles sont un peu comme des airs à eux seuls, ils sont également exigeants vocalement. L’enjeu c’est de savoir mesurer son énergie et son endurance.

Le côté théâtral fait-il partie des choses qui vous plaisent dans l’opéra?

Tout me plaît dans l’opéra. J’aime le fait de pouvoir incarner des personnages différents, c’est fascinant. Dès qu’on a du texte, on incarne forcément quelque chose et il faut expérimenter. Quand on est dans le processus de création, on se projette dans le personnage, on explore, c’est un laboratoire de recherches et, lorsque les lumières et les costumes arrivent, c’est le cran supérieur qui complète cette recherche et cette incarnation de personnage. Il y a aussi l’orchestre. On passe par une phase où il faut se recaler, retrouver ses repères auditifs, car entendre un orchestre est différent d’entendre le piano, mais c’est une chance incroyable.

Sans oublier tout ce qu’il se passe derrière le plateau. Il faut voir ce qu’est une représentation d’opéra depuis les coulisses, il se passe énormément de choses! C’est une œuvre dense à tous points de vue, au niveau musical car on est nombreux à chanter et jouer, mais aussi au niveau de l’organisation dans les coulisses, les machinistes, accessoiristes, costumiers, etc. C’est quelque chose de grandiose!

Propos recueillis par Sébastien Cayet 


Elisir d'Amore, de Donizetti

Adriano Siniviar, mise en scène
A découvrir les 2, 4, 5, 6, 7 et 9 octobre à l'Opéra de Lausanne

Représentations avec distribution internationale (Valentina Nafornita, Dovlet Nurgeldiyev, Giorgio Caoduro), les 2, 5, 7 et 9 octobre
Les représentations "jeunes solistes" auxquelles participe la soprano Laurène Paternò sont celles des 4 et 6 octobre

Infos, réservations:
https://www.opera-lausanne.ch/show/lelisir-damore-3/

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