Social Tw. Fb.
Article

"C’est une réussite absolue"

Publié le 09.11.2024

L’Opéra de Lausanne présente, dès le 17 novembre, l’œuvre Fortunio du compositeur français André Messager.

Pour cette production mise en scène par le comédien Denis Podalydès, la fosse sera occupée par la Sinfonietta de Lausanne, dirigée par Marc Leroy-Calatayud.

Né à Lausanne, le jeune chef se forme à Vienne et Zurich et conduit de grandes phalanges comme les Orchestres nationaux de Bordeaux et d’Île-de-France, l’Orchestre de la Suisse Romande, l’Orchestre de Chambre de Genève ou le Tokyo Symphony Orchestra.

Passionné d’opéra, Marc Leroy-Calatayud présente notamment, sur sa chaîne YouTube, des vidéos d’introduction à l’opéra pour partager son enthousiasme avec le grand public.

Rencontre avec ce jeune chef passionné.



Vous dirigez, à partir du 17 novembre, Fortunio, un opéra méconnu de André Messager.

Ce n’est pas un opéra très connu, et c’est dommage !

Il est un peu tombé dans l’oubli alors que c’est une vraie pépite. Fortunio est un opéra d’André Messager d’après une pièce de théâtre de Musset, une pièce extrêmement vive et spirituelle, qui raconte les amours de Jacqueline dans une petite ville de province où il ne se passe pas grand chose.

Elle est mariée à Maître André, un notaire plus vieux qu’elle. Puis, arrive en ville le capitaine Clavaroche, un bel homme séducteur qui va devenir l’amant de Jacqueline. Maître André étant très jaloux, elle va détourner ses soupçons en faisant semblant de se faire courtiser par un clerc de notaire pour que la jalousie de son mari se porte sur la mauvaise personne.

Ce jeune clerc, c’est Fortunio, fou amoureux de Jacqueline, elle-même très sensible à cet amour sincère. Tous deux vont découvrir le grand amour.



Connaissiez-vous l’opéra avant de vous en voir confier la direction ?

J’avais vu la captation de l’Opéra-Comique en 2019, dans laquelle plusieurs de mes amis chantaient. Pendant le Covid, ils avaient mis en ligne cette captation en libre accès, donc je l’avais vue à ce moment-là, et j’avais déjà trouvé l’œuvre géniale, en particulier dans cette mise en scène de Denis Podalydès, un grand homme de théâtre et de cinéma.

Créée en 2009, cette mise en scène est sa première pour l’opéra. C’est une réussite absolue.

Avez-vous lu la pièce de Musset pour préparer votre interprétation ?

Oui, c’est quelque chose à quoi on s’intéresse toujours quand l’opéra vient d’une œuvre littéraire. Pour La Traviata, par exemple, c’est très intéressant de lire La Dame aux Camélias.

Dans tous les cas, cela fait partie du travail de préparation, ne serait-ce que pour voir de quoi le compositeur s’est inspiré et étudier les différences par rapport au texte initial.

Naturellement, dans une pièce, il y a plus de texte que ce qu’un chanteur chante à l’opéra. Certains éléments de la pièce de Musset ne sont pas exprimés par le texte mais par la musique ou ont été sciemment omis par Messager et son librettiste. C’est une source supplémentaire d’information.





Les œuvres méconnues nécessitent-elles un plus long temps de préparation ?

C’est moins connu, mais l’approche est toujours la même : il s’agit de connaître la partition : on l’étudie, on la joue, on la chante, on se renseigne sur le compositeur, l’époque, le style...

C’est du répertoire français post-romantique, un répertoire que je dirige beaucoup ces dernières années. C’est un style avec lequel je suis familier.

Dans une vidéo pour l’Opéra de Lausanne, vous parlez d’influences de différents compositeurs dans cette œuvre.


Ce qui est formidable dans cette partition, c’est que Messager, avant même d’être compositeur, était un très grand chef d’orchestre. Il est notamment le dédicataire de Pelléas et Mélisande de Debussy, donc il était parmi les grandes stars de son temps.

C’était aussi quelqu’un de très enthousiaste de tous les styles de musique qu’il dirigeait, et il dirigeait un peu de tout : de la musique légère, du Wagner... il a notamment fait le « pèlerinage » à Bayreuth.

Il savait comment tous ces compositeurs écrivaient et dans ses propres partitions, c’est extrêmement bien écrit pour la voix et pour l’orchestre. Il utilise des éléments d’orchestration dont il s’inspire à gauche et à droite. Ce ne sont pas pour autant des emprunts, ce sont des techniques, des éléments de langage qu’il réutilise.

Quand on écoute, on sait immédiatement que c’est de Messager, mais on entend aussi les influences de Fauré, Saint-Saëns, Gounod, Wagner, un peu de Verdi aussi...





Ce sont des influences qu’il utilise à des fins précises, comme Wagner pour une dimension dramatique...?

Pas toujours. Certains passages ont des harmonies ressemblant à du Fauré, d’autres ont des orchestrations debussystes... Par contre, les duos d’amour, eux, sont très identifiables et inspirés de Massenet et de Wagner. Il y a quelque chose dans la progression harmonique et le traitement de la ligne.

Là où c’est très fin, c’est que ce n’est pas du copier-coller, c’est fait avec classe et finesse. C’est juste la bonne proportion d’influence pour que cela s’intègre dans le tout.

Vous décrivez André Messager comme un grand enthousiaste de tous les styles qu’il dirigeait. Vous retrouvez-vous dans cette description ?

Ce qui m’intéresse à l’opéra, c’est le répertoire où il existe un lien fort entre la musique et le texte. En ce sens, avec Messager, je ne pouvais pas mieux tomber : c’est une musique très riche, toujours au service du texte.

Ce qui l’intéressait avant tout, c’était le théâtre musical. Il aimait tout particulièrement l’opéra comique à la française où le texte est primordial. Comment, avec quelques accords, des figures rythmiques, une instrumentation, la musique va pouvoir révéler le sens du texte ? Là était son intérêt.

Pour ma part, je préfère diriger un répertoire allant de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui, avec un sens du texte central.

Le bel canto chez Donizetti et le jeune Verdi, c’est plus une célébration de la voix qu’une mise en lumière du texte. Je dois dire que c’est un répertoire que j’affectionne un peu moins.

La direction d’opéra représente la plus grande part de votre activité. Qu’est-ce qui vous plaît particulièrement ?

L’opéra est ma principale activité. Je suis plus à l’aise dans une fosse d’opéra qu’en symphonique.

Ce sont des plaisirs différents, mais ce que j’aime avec l’opéra, c’est qu’on est aux commandes d’une formidable « machine à rêver ».Quand vous entrez dans la fosse, c’est vous qui dictez le rythme de la soirée. Vous savez que vous allez faire rêver des gens et être aux commandes d’une boîte d’où vont sortir des sons, une histoire, des personnages, des costumes, des décors, de la lumière...

.... quand on y pense, c’est la version grandeur nature des histoires que l’on peut se raconter quand on est enfant.

Propos recueillis par Sébastien Cayet


Fortunio
Du 17 au 24 novembre à l'Opéra de Lausanne

Un opéra de André Messager, d'après Alfred de Musset

Marc Leroy-Calatayud, direction musicale - Denis Podalydès, mise en scène
Avec  Pierre Derhet, Sandrine Buendia, Marc Barrard, Christophe Gay, Philippe-Nicolas Martin, Jean Miannay, Benoît Capt

Sinfonietta de Lausanne - Chœur de l’Opéra de Lausanne dirigé par Anass Ismat

Informations, réservations:
https://opl.shop.secutix.com/selection/event/date?productId=10229170551856

Filtres

Nous utilisons des cookies pour vous garantir une expérience optimale sur notre site web. En continuant à naviguer sur le site, vous acceptez notre utilisation des cookies.

ACCEPTEZ & FERMER Annuler