Changer la vie

Alexis Forestier et André Robillard sont d’étranges compagnons de scène. Ensemble, ils ont forgé une première aventure scénique intitulée Tuer la misère, tentative hybride et iconoclaste, qui les propulsait dans les inventions visuelles et les improvisations langagières de Robillard, aux prises avec le langage musical et scénique de Forestier. Les deux artistes font à nouveau attelage, cette fois-ci pour changer la vie qui est un prolongement de cette première pièce, davantage resserré encore sur leur complicité.

A 83 ans, André Robillard est l’un des artistes majeurs de l’Art Brut, découvert par le fondateur de la collection lausannoise, le peintre Jean Dubuffet. Sa mémoire est emplie d’avions, d’animaux, de bruits et de langues qui ouvrent de lointaines contrées. Son imaginaire est peuplé de Martiens et de navettes spatiales. Le spectacle s’est construit selon cette propension à accumuler, empiler, collecter, inscrire des traces, avec des lignes de fond et des motifs issus du travail de Forestier. Ainsi ont pris place certains "songs" de Bertolt Brecht et de Hans Eisler, comme la terrible charge contre la guerre Aux soldats allemands sur le front de l’est, ou les Berceuses aux mères des travailleurs qui reviennent en "leitmotiv".

Lorsqu’il s’est pris d’amitié pour cet inventeur de langues, ce constructeur de fusils, Alexis Forestier a voulu aller à la rencontre d’André Robillard mais également l’inviter à entrer dans les paysages multiples de la compagnie Les endimanchés : un goût prononcé pour la culture populaire, présent dans leurs premières expériences, mêlé à un travail constant de relecture des avant-gardes, et un amour immodéré pour les écritures marginales, étranges, instables.

C’est très simplement qu’ensemble ils ont commencé à construire ce théâtre/concert, proche de la performance, sur 
un mode à la fois burlesque et grave, ludique et fragile, qui
 se poursuit maintenant depuis plusieurs années et a amené Robillard à dire : "on pourrait même se demander si l’art c’est pas puissant. [...] C’est le machin d’artiste de l’art qui a fait disparaître la misère. Détruire la misère c’est pas rien. C’te sacrée misère…"

Théâtre de Vidy à Lausanne du 02 au 17 décembre 2014.

Mise en scène, scénographie, conception sonore Alexis Forestier
Avec Alexis Forestier, André Robillard et avec la voix de Charlotte Ranson